80ème anniversaire de la Sécurité sociale (1945–2025)

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la Sécurité sociale est créée en octobre 1945 par le gouvernement provisoire dirigé par le général de Gaulle, avec un rôle central joué par Ambroise Croizat et Pierre Laroque.

Le Conseil National de la Résistance (CNR), dans son programme de mars 1944 intitulé Les jours heureux, proposait « un plan complet de sécurité sociale visant à assurer, à tous les citoyens, des moyens d’existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail ».

En septembre 1944, Alexandre Parodi, ministre du Travail et de la Sécurité sociale (9 septembre 1944 – 21 novembre 1945), confie à Pierre Laroque la mission de mettre en œuvre ce projet de Sécurité Sociale, qui sera concrétisé par les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945.

Ambroise Croizat, ministre du Travail (21 novembre 1945 – 26 janvier 1946), député de la Seine et militant communiste, est l’un des principaux artisans politiques de la mise en œuvre de ce projet. Il supervise la rédaction des ordonnances fondatrices et veille à leur application.

Pierre Laroque, haut fonctionnaire, est chargé de concevoir l’architecture administrative du système. Il devient le premier directeur général de la Sécurité sociale (directeur général des assurances sociales, puis de la Sécurité sociale d’octobre 1944 à octobre 1951) et joue un rôle décisif dans sa structuration.

Dans l’ordonnance du 4 octobre 1945, l’article premier est ainsi formulé :

« Il est institué une organisation de la sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent.

L’organisation de la sécurité sociale assure dès à présent le service des prestations prévues par les législations concernant les assurances sociales, l’allocation aux vieux travailleurs salariés, les accidents du travail et maladies professionnelles et les allocations familiales et de salaire unique aux catégories de travailleurs protégés par chacune de ces législations dans le cadre des prescriptions fixées par celles-ci et sous réserve des dispositions de la présente ordonnance.

Des ordonnances ultérieures procéderont à l’harmonisation desdites législations et pourront étendre le champ d’application de l’organisation de la sécurité sociale à des catégories nouvelles de bénéficiaires et à des risques ou prestations non prévus par les textes en vigueur. la couverture des charges de la sécurité sociale est assurée par des cotisations assises sur l’ensemble des rémunérations et gains perçus par les bénéficiaires de chacune des législations. »

Les principes de cet article fondateur sont souvent repris dans une formule : « De chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins ».

Cette réforme est l’une des plus ambitieuses de l’après-guerre, portée par une volonté de justice sociale et de reconstruction nationale, elle marque une rupture avec les systèmes antérieurs, souvent fragmentés et inégalitaires.

80 ans plus tard, il n’est pas inutile de rappeler son origine issue du programme du Conseil National de la Résistance, et d’honorer ses bâtisseurs, pour réaffirmer ses principes : solidarité, universalité, mutualisation des risques. Et de rappeler la promesse faite par Ambroise Croizat devant l’Assemblée nationale en 1945 : « Mettre définitivement l’homme à l’abri du besoin, en finir avec la souffrance et les angoisses du lendemain ».
La Sécurité sociale incarne un véritable choix de société : garantir à chacune et chacun des droits sociaux fondamentaux, de la naissance à la fin de la vie. 80 ans plus tard, ce modèle demeure une conquête fragile, sans cesse menacée.

Nous avons, nous aurons à défendre ce bien précieux, et de rappeler le message prémonitoire que François Mitterrand adressait lors du dernier Conseil des ministres de 1993 et rapporté par Ségolène Royal : « (…) Ils s’en prendront aux retraites, à la santé, à la Sécurité sociale, car ceux qui possèdent beaucoup veulent toujours posséder plus et les assurances privées attendent de faire main basse sur le pactole. Vous vous battrez le dos au mur » avait-il dit à son gouvernement. Il savait la rudesse de ce combat permanent.

Jamais les néolibéraux n’ont en effet autant vidé les ressources de la Sécurité sociale, à force d’octroyer sans contrepartie des exonérations de cotisations sociales aux entreprises, s’étonnant ensuite du déficit structurel de la Sécurité sociale.

Défendre la sécurité sociale pour faire respecter ce que témoigne son Manifeste d’anniversaire : « un modèle solidaire au cœur de notre pacte républicain, qui protège sans exclure, qui accompagne sans distinction, qui unit sans diviser. (…) La Sécurité sociale est plus qu’un droit, c’est un choix de société. ».

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